Triple voix de l’architecte
Ces modalités du Nouveau Portrait de l’architecte, sont ici dites en trois poèmes, créés par Yves Bergeret à Veynes le 27 novembre 2019, en double exemplaire sur quadriptyques de Gerstaecker Aquarelle 300 g de 25 cm de haut par 65 cm, à l’acrylique et encre de Chine.
Ce groupe de trois poèmes se lit en italien, dans une traduction dynamique et sensible du poète Francesco Marotta, à cette adresse : https://rebstein.wordpress.com/2019/12/01/architetto-ii-iii/
1
Avec un dessin à l’encre de Chine et au piquant de porc-épic de Dembo Guindo qu’il a fait sur le thème de la pluie, à Koyo le 21 juillet 2006
C’est moi qui suis derrière la montagne,
je la pousse
vers un certain accomplissement
qui sera notre maison commune.
J’appelle, j’appelle la parole
comme un plat de riz,
comme un plateau où poser nos verres,
comme dans une mer fourbe
le pont d’un bateau.
2
Avec un dessin à l’encre de Chine et au piquant de porc-épic de Yacouba Tamboura qu’il a fait aussi sur le thème de la pluie, à Koyo le 21 juillet 2006
C’est moi qui suis la robustesse de la pluie
depuis la grande tête luisante du ciel
jusqu’à vos pieds dans le sable.
Je suis les veines très rapides
où coule la parole
qui sait dissoudre
les ricanements des meurtriers.
3
Avec un dessin à l’encre de Chine et au piquant de porc-épic de Alguima Guindo qu’il a fait sur le thème de ses propres lignées d’ancêtres, à Koyo le 14 juillet 2006
C’est moi qui suis le passé dans le chant,
le passé qui agglutine les montagnes.
Mais le chant, je dois bien le reconnaître,
est la pluie douce et bienfaisante
qui libère la pensée dormante des grottes
et me fait accoucher de moi
en une source d’eau tiède
aussi sacrée que mon nom futur.
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3 réponses à “Triple voix de l’architecte”
Rètroliens / Pings
- 01/12/2019 -
Je trouve que l’écriture du poème par dessus la couleur lui donne l’ expressivité la plus profonde possible dans la pluralité chromatique.
Un certain sacrifice de la lisibilité conduit en fait à la dimension spirituelle du texte. Une lecture tremblante parce qu’elle est pleine de sens.
Le mot vibre en découvrant le sens de l’œuvre, la voix bégaye en première lecture.
La dyslexie induite révèle une nouvelle façon de comprendre l’œuvre d’art.
Dites-moi si j’ai mal interprété.
Cette interprétation me semble d’une intelligence et d’une puissance visionnaires. Elle traverse le temps et l’espace. Dans l’antre de la Sibylle à Cumes ou de la Pythie à Delphes le bégaiement splendidement décrit et transmis par Virgile fissure la somnolence du monde.
J’ai toujours pensé et agi en pensant que le poème que je crée est écrit deux fois, l’une par les lettres de l’alphabet latin mis en mots mis en phrases, l’autre par les gestes graphiques, traits en mouvements dynamiques et en fluidité rythmée ; car l’agencement des lettres de l’alphabet permettent de tenter de satisfaire le besoin de compréhension plutôt de la pensée rationnelle, tandis que l’agencement des gestes graphiques colorés permettent, parallèlement, de tenter de satisfaire plutôt le besoin de compréhension de la pensée animiste et de la pensée symbolique. Les trois pensées se conjoignent dans un poème calligraphié .
Dans toutes les oeuvres créées à Koyo avec les « poseurs de signes » Toro nomu il en a toujours été ainsi.
Ici les trois poèmes sur quadriptyques consonnent avec des photos des falaises de Koyo et, à l’avant-plan à droite, avec une pierre de Sardaigne.
Yves Bergeret