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Ocelles du guépard

« Poema » faisant partie d’un plus vaste ensemble qui sera bientôt publié, ici calligraphié à l’acrylique et à l’encre de Chine le 16 mai 2023 à Veynes sur un grand Leporello chinois à vingt-quatre volets au format déplié de 25 cm de haut par 408.

Voici comme le très dynamique poète Francesco Marotta l’offre aux lectrices et lecteurs dans sa traduction italienne : https://rebstein.wordpress.com/2023/05/19/gli-ocelli-del-ghepardo/

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Voici l’ocelle de mon nom

qui passe à mon index, à son tour, l’anneau

d’une dignité à laquelle obligent certains ancêtres

parce qu’ils surent rester libres.

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Voici l’ocelle de ma continuité dans le temps

qui rapproche la paroi immémoriale de mon simple rachis.

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Voici l’ocelle de la flexion de mes genoux

et jaillissant par son cercle chaque aube je réapprends

à me lancer en flèche dans la question infinie.

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Voici l’ocelle de ma désintoxication des objets

qui m’allège m’allège m’allège

jusqu’à la proximité du cœur du vent.

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Voici l’ocelle de l’immensité de mon respect

que jamais assez je n’atteins et pourtant ce havre

est le seul pour ne pas s’asphyxier dans les haines.

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Voici l’ocelle de ma scission en deux

comme la monnaie ou la lune ont deux faces

et même je préfère m’écarter de moi-même

par-dessus la faille des eaux originelles.

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Voici l’ocelle du puits de ma joie

si profonde et profuse sous les douleurs que rire

et sourire et rire éclaboussent chacune et chacun

dans les ressacs des éboulis avant que je ne grimpe.

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Voici l’ocelle de l’orchestra

où nu-pieds nos mères incantent chaque printemps

la gestation, la parturition, la crainte d’or et de sang.

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Voici l’ocelle de la ceinture de l’équateur

vaste comme les vents étésiens

et j’ouvre sans fin les crans de ma ceinture

pour qu’affamés et meurtris du Sud

puissent atteindre un accueil au Nord s’il sait.

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Voici l’ocelle de la surrection de la montagne

qui s’effrite et se hausse avec les vents et moi

car je grimpe et j’érode

j’érode et je grimpe.

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De la vêture de ma fourrure ocellée

je me départis à toute heure,

que je grimpe à l’arbre qui accède au ciel

ou que je grimpe à la paroi qui jaillit de la mer.

J’accepte le souple maillage des ocelles

et le quitte à chaque relais de mon escalade,

puis je le reformule plus clair.

Chaque jour me voici plus léger, plus svelte,

tout brouillard dissipé,

dans l’aube à la source de la pensée,

dans la vapeur de la parole qui juste à son aval

frémit, ocellée.

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Yves Bergeret

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Mélèze

Poème en quatre strophes créé et calligraphié à l’acrylique et encre de Chine à Briançon le 20 avril 2023 sur diptyque de Fabriano 224 g, au format déplié de 24 cm de haut par 32.

Renard roux en toute saison, mélèze en ses flammes d’automne, mélèze renaissant au printemps, grâce au poète Francesco Marotta, voici en italien leur vivacité : https://rebstein.wordpress.com/2023/05/11/larice/

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1

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Souples aiguilles

mélèze encore frileux d’avril,

je passe et glapis.

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2

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Tendres aiguilles

juvénile mélèze d’avril,

jette en plein vent

la question que je lape.

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3

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Aiguilles et frêles cônes

mélèze enfant pour toute ta vie,

respire dans mon haleine ;

je remonte à pas gourds tailler la pierre

dans la masse métamorphique

où j’excave l’humain profil.

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4

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Souples aiguilles

mélèze adolescent jusqu’à l’hiver

respire avec mon souffle de tailleur de pierre ;

je remonte à pas lourds la pente

pour passer dans la paroi encore glacée

le surfil de l’humain destin.

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Yves Bergeret

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Cavernicole ne saurait périr gelé

Photos prises en allant à Vercheny, en aval de Die, au lever (glacé) du soleil le 11 février 2023

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Le poète Francesco Marotta a fait venir en italien, avec autant de vigueur que d’esprit, ici : https://rebstein.wordpress.com/2023/04/30/il-cavernicolo/ les strophes vivaces de ce poème afin que personne ne gèle chez soi.

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N’arrivant pas à réchauffer ma grotte glacée

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je me suis mis à penser

au jeune Grec et à sa fiancée chinoise

à l’esprit si pétillant qu’ils font fondre

les icebergs de la sclérose mentale,

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je me suis mis à penser

à la main infatigable du peintre

qui dissèque le grand cyclope

et chaque nuit sur sa montagne rouge

remonte l’échafaudage d’où repeindre

le décor de scène pour la tragicomédie,

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je me suis mis à penser

au pianiste si lucide

que face aux crocs de la méchanceté

il déploie les grandes nuées enveloppantes

de Schubert et de Brahms.

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Vieilles parois si épaisses de ma grotte

dégelez-vous !

Ah, qu’elles sont lentes…,

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je me suis mis à penser

à la bryologue qui chante de joie en voyant l’herbe

écarter les pavées parisiens et en prenant

la mesure de montagnes lisses

de l’hémisphère sud,

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je me suis mis à penser

au Hollandais grand et pianiste

qui marche sous la neige à Briançon

et me chante à tue-tête dans un bar

le chœur d’entrée d’une cantate

de son arrière-grand-oncle Bach,

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je me suis mis à penser

au cinéaste que rien n’essouffle

à chercher les strophes de mon poème

dans la paroi ivoire et noire

de la plus farouche montagne.

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Yves Bergeret

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La guerre et la paix, avec Nicolas Hilfiger (1)

Sur un dessin que Nicolas Hilfiger a créé et intitulé ainsi, à Montrouge le 7 janvier 2023 sur papier 140 g au format vertical A4, en techniques variées.

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Cette fable poétique et cruelle a voyagé, grâce au poète Francesco Marotta, jusque dans la langue italienne, de la manière que voici : https://rebstein.wordpress.com/2023/04/24/la-guerra-e-la-pace/

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Des décennies et des siècles

t’ont élevé chapitre à chapitre

et ont fait que tu sois ce grand récit

étiré en trame verticale,

comme une maison céleste d’échafaudages et de filins

avec des salles, des galeries ouvertes, des terrasses

où passent à pas feutrés tes oncles

et courent tes nièces en riant avec des enfants

diaphanes qui ne sont pas de ton sang

mais sûrement d’un village de l’autre côté du réel

où personne, semble-t-il, ne sait haïr.

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Il est sûr que la lumière toute à son aise

peut aller, monter et descendre

en acrobate si légère

par les chambres et les places et les alcôves :

n’est-ce pas ici

tout ce monde

qui se nomme paix ?

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Il est sûr que le vent sait,

comme une parole mythique,

traverser à l’horizontale ton tressage vertical,

qui est de porches, d’huisseries, de lucarnes,

et d’une immense fenêtre

où passe certaine foule.

Il est sûr que le vent pourrait décrire

les silhouettes des nièces ivoirines

et des oncles hardis comme condottieri.

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S’écartent de la foule trois personnes

qui s’accoudent à la plus petite fenêtre

modeste comme la prochaine courte phrase

encore sans ponctuation.

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S’écartent trois personnes, yeux clairs

qui voient s’ouvrir de l’autre côté

encore d’autres chambres et là à gauche

deux vallons aux vignobles dorés.

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Se lèvent les trois personnes,

s’écartent les trois personnes,

vont les trois personnes

par la pente pierreuse d’un vignoble rouge.

La terre gronde.

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De par-dessus

tombe une bombe.

Eclate la bombe.

La maison s’effondre.

La trame chancelle.

Des visages perdent peau par moitié, perdent nom,

douceur, nom.

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Quel monstre tue ?

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Yves Bergeret

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« Filtrer l’eau avant l’aube », dessin d’Antonio Devicienti

« FILTRER L’EAU AVANT L’AUBE »

encres de différentes couleurs et crayon sur papier,

14 cm de haut par 21

à Orino, Italie, le 6 janvier 2023

en écho à la dernière publication, ce matin même, de ce blog :

Calcaire et marne

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Calcaire et marne

Poème écrit et calligraphié en observant la vaste Montagne de l’Oule à Veynes et la Montagne de Fontarache à Serres le jour du 5 janvier 2023, sur quatre triptyques de Papier U 180g de format déplié 21 cm de haut par 29,7.

Des première et quatrième strophes de ce poème, le poète Francesco Marotta propose une libre et fluide traduction en italien, que voici : https://rebstein.wordpress.com/2023/04/08/calcare-e-marna/

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1

Qui vit clair et probe avec soi

et probe et clair avec tous

sait que sa vie est une montagne

où chaque jour évolue entre calcaire et marne

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2

Qui rogne ses griffes et crocs

et vit avec tous écoutant transmettant

sait que sa vie coule limpide torrent

entre marnes tendres et dures strates.

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3

Qui a tant émoussé fendu durci

ses talons à force d’aller de boue à roche

et de drame à joie

sait que sa vie sans ronce ni fard est heureuse.

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4

Qui vit sans cadenas ni brandon

se préoccupe non pas tant de posséder des choses

que de précéder l’aube près de la fontaine

pour filtrer l’eau que tous viendront boire.

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Yves Bergeret

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Demandes de la montagne

Poème écrit et calligraphié en observant l’énigmatique Montagne de l’Oule à Veynes le jour du 4 janvier 2023, sur quatre triptyques de Papier U 180g de format déplié 21 cm de haut par 29,7.

Les quatre strophes de ce poème se lisent dans une claire et somptueuse traduction du poète Francesco Marotta, la voici : https://rebstein.wordpress.com/2023/05/09/richieste-della-montagna/

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1

Donne-moi une main agile

pour écrire pour tailler pour assembler

pour écarter pour pivoter,

dit la montagne.

Je suis le dos de vous tous,

portant collé au mien le dos de Prométhée,

portant rocher de Sisyphe.

Classer est inutile.

Toucher et nommer, nous le devons tous.

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2

Donne-moi les cordes vocales de l’aube

pour libérer l’esclave

pour apaiser pour apprendre à répondre,

dit la montagne.

Je suis le grenier de tous vos mythes. L’aube m’ouvre

et je porte l’insecte qui joue sur l’épi dans la main de l’enfant.

Je porte l’oiseau qui saura aussi verser graines

à la maison bombardée.

Cacher est mortel.

Dire et saluer, nous le devons tous.

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3

Donne-moi un visage et ses muscles

pour diluer la peur, pour sourire et non haïr,

dit la montagne.

Je suis l’affection patiente de toutes vos générations

qui se sont dilapidées à s’entrégorger.

Je suis la très tendre roche très dure

portant à la portée de vos cordes vocales

le poème choral.

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4

Donne-moi une bouche qui ne craint de s’ouvrir

pour dire le mot qui pulvérise la violence,

pour respirer avec le vent fécond,

dit la montagne,

ma langue le granit

mon palais le ciel

ma langue hommes et femmes

mon palais ancêtres et enfants.

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Yves Bergeret

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La montagne d’hiver

Poème écrit et calligraphié en observant la sombre Montagne de l’Oule à Veynes le soir du 3 janvier 2023, sur quatre triptyques de Papier U 180g de format déplié 21 cm de haut par 29,7.

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1

C’est à l’arrière des maisons et des rues,

c’est juste le souffle ligneux de la nuit,

de ce qui est beaucoup plus sombre que le sang.

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2

Dans la tragédie

c’est avant la colère du second acte

quand les héros se regardent en riant

avant de s’entretuer.

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3

C’est ce qu’entend la coque de la carène

quand elle racle un haut fond

et alors jaillit en pleine nuit

le cri blanc de la fraternité.

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4

C’est le triple meurtre

de la mère, du père et du tout premier aïeul,

l’inatteignable androgyne,

mais la mémoire en sa touffeur

n’est jamais meurtre,

elle est juste sacrifice

et la montagne au soir enfle encore.

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Yves Bergeret

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Mers, Morsures, Caresses    par Xavier Lemaître

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I

Une littorine fossile

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Lettrines de la grande saga des mondes marin et terrestre, les littorines fossiles se dessinent aux flancs des falaises, se lisent sur les plages parcheminées, se trouvent aux sommets des montagnes.

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On les disait antédiluviennes, elles sont aujourd’hui classées et datées. D’origine marine, les littorines se sont caparaçonnées : ABRI DÉFENSE MONTURE. Après le retrait des eaux, par milliards, ces mollusques gastéropodes se sont échoués, agrégés, pétrifiés : fragiles témoins de l’outrage aveugle du temps et du génie chimique de la fossilisation par carbonisation.

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Désormais la montée des eaux affaisse la falaise. Le fossile s’égare, s’immerge, disparaît dans l’étroit goulot du sablier cyclopéen de l’oubli.

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Parfois l’érudit attentif l’aperçoit, le recueille, le nomme, le latinise.

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Alors le savant déchiffre son héraldique.

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Le plasticien admire ses arabesques.

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La littorine enrichit le grimoire d’un conservateur.

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Son étude alimentera le grand récit.

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II

Deux crinières en morsures et caresses

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Crinières en bataille

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« J’aimai les fiers coursiers, aux crinières flottantes »

Victor Hugo

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Une jolie mèche rebelle s’est dévoilée 

Sous l’œil pudibond du parangon de vertu.

Un léger poil discret a défrisé

Les nerfs sourcilleux du furibond poilu.

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– Jeune femme, ta chevelure très peu visible 

T’a valu bien des tourments !

– Jeune homme, ta barbe trop peu ostensible

T’a valu bien des tourments !

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La mèche insurgée et le poil rétif

Conversent, devisent, se hérissent

En fauve crinière rugissante

De vie et de paix, d’amour et de liberté.

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Alors toutes les follettes foultitudes fabuleuses

De fouets pileux couronnés de crin et de cran, 

Fustigent les obscurs parasites fils du néant,

Enflamment les fort grands cœurs pleins d’allant.

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Crinières dévoilées

               .

« Si je confie au vent

            ma chevelure ambrée 

j’attraperai toutes les gazelles des champs »

Tâhereh, poétesse iranienne, 1817-1852

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Peine capitale pour écart de voile : elle périt en silence.

Dévoilement fleurit la capitale : elles en parlent vivement.

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Bruits bestiaux et brutalités barbares s’abattent sur

Cris d’alarme et crinières créditées de courage.

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Les averses de coups peinent à tarir l’écume des

Paroles émergentes et le flot des cortèges solidaires.

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Sans voile, ni tresse, les chevelures déliées flottent

et volent sur les avenues où elles tissent leur bannière 

de révolte.

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Voix et corps affranchis portent haut cet étendard

qui dessille le regard, éclaire l’entendement, exhorte

à la conscience.

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L’oriflamme clame une devise universelle :

VIE FEMME LIBERTÉ

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III

Trois écumes des mers

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Grandes marées océaniques

– Des cohortes de vagues déferlent et dévorent les frêles troupeaux des rochers-plantons. Leurs caresses perfides anéantissent les derniers glacis de sable sec. Leurs lèvres écumeuses se mordent et s’embrassent fougueusement. Des légions de lames salées lèchent l’étale placide des coquillages puis hachent et tranchent la plage désarçonnée.

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Naufrages Méditerranée 

– La mer caresse avec adresse ou mord rageusement. Elle porte majestueusement ou engloutit impitoyablement ses cavaliers de fortune… ou d’infortune. Tel, vainqueur d’un désert de sable, sera vaincu par cette mer aveugle et ses complices naufrageurs.

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Mer Noire violentée

– Voici face à la mer sombre, très sombre : Odessa, port nourricier universel que le canon cherche à réduire en famélique souricière. En mer, des pêcheurs sont coulés, en plaine, des semeurs sont fauchés. Ils n’iront plus au bois.

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Chaos cadavérique

Ailée, embarquée, chenillée ;

la mort rôde, grogne, mord :

Qui la musellera ?

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Mots désœuvrés

Maçon, où est ta dernière maison ?

– Seules mes mains s’en souviennent.

Qu’est-elle devenue ?

– On dit qu’elle est pillée, incendiée.

Sa cave voûtée ?

– Disparue, toute honte bue !

Sa porte en bois ?

– Des voleurs l’ont emportée.

Ses fenêtres aussi ?

– Non ! L’explosif les a volées.

Son mobilier?

– Exilé !

Sa cheminée ?

– Brûlée, elle veille le retour du foyer.

Sa chambre ?

– Les amants y ont perdu le sommeil.

Et son grenier ?

– Rien ! Si le grain n’y meurt !

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Calcul mental

Guerre sans nom ni visage :

« OPÉRATION SPÉCIALE »

= sordide soustraction.

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Les évasions se multiplient chez l’envahisseur. Ses annexions divisent.

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Choses vues

Peintre, explique-moi les couleurs !

– J’ignore ce dont tu parles.

Les jonquilles ?

– Le soufre les a fanées.

La mer ?

– Noircie !

Les champs de blé ?

– Fauchés par la mitraille.

Le ciel ?

– Couvert !

La blondeur de la jeunesse ?

– Elle blanchit sous la poudre.

Les yeux bleus des femmes ?

– Noyés de larmes.

Les couleurs de ton drapeau ?

– Deuil

Et ?

– Sang !

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« La couleur est un corps de chair où un cœur bat »

Malcolm de Chazal, poète, écrivain et peintre mauricien

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Résistance galvanisée

Petit, sourd et aveugle,

Le Sans-Parole décrète « anéantissement ».

Face à lui, tout un peuple vif se rebiffe.

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Xavier Lemaître

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à Saint-Brieuc 2, mi-décembre 2022

On lit en italien, grâce au poète Francesco Marotta, la première partie de ce poème-ci consacré à « la porte », ainsi que certaines parties du poème de la publication précédente « à Saint-Brieuc 1, fin novembre 2022 ». Voici le lien pour y accéder : https://rebstein.wordpress.com/2022/12/31/lo-sguardo-che-ascolta/ .

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La Porte

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Trois poèmes, chacun en quatre strophes sur quatre triptyques de 224g Fabriano Tecnico de format déplié de 21 cm de haut par 29,5, à l’acrylique et à l’encre de Chine, le 12, 13 & 14 décembre 2022, à Saint-Brieuc.

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1

Porte impatiente

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Si c’est l’océan qui ouvre la porte

le sel t’éclabousse.

Tant mieux.

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Si c’est l’air qui passe sous la porte

le chant des êtres libres te saisit aux chevilles.

Tant mieux.

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Le rai de lumière sous la porte

aspire la cage de l’escalier.

Tant mieux, le volcan de la vie

attend ton souffle.

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Ecoute comme le vent lointain

s’appuie à ta porte.

Ecoute comme elle grince.

Traduis vite notre merci

et ouvre.

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2

Porte imminente

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La poignée de la porte

se tourne comme phrase au futur,

celle que te psalmodie l’horizon.

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Porte, hoquet de la cave,

misérable roche

qui bouche la narine de la montagne.

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Porte, visage

et derrière le visage la chambre

aux masques pendus aux murs.

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Porte, notre miroir intime à deux faces,

ta course haletante

parmi les archipels violents,

mon écoute de ton rire

quand tu reprends souffle.  

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3

Porte ouverte

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Nous avons assez tourné en rond.

Partout nous cherchons la porte

pour sortir des souterrains.

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Porte dégondée,

aussitôt s’illumine

visage de l’aveugle

chantant sous la lune.

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Qui passe déjà sa main ?

Qui nous précède sur la terre libre ?

Porte, parle-nous, parle-nous clair !

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Porte, bois de la porte,

planches du pont de la carène,

montagne ligneuse

où poudroie notre liberté,

merci !

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Yves Bergeret

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