Semainier de l’envol des montagnes par le Gagok

Alors que les intempéries les plus violentes ravagent les hauts vallons d’accès aux plus hardis sommets de l’Oisans, pluies en déluge, crues, avalanches de pierres et, même, coulées de boue entraînant à grand dol tel qui s’y aventure ( Inondations en cours dans le massif | Parc national des Ecrins (ecrins-parcnational.fr))

mais en ne cessant d’admirer la ténacité tant du chant coréen Gagok et que des Fragments de Kafka (1987, violon et voix) de Kurtag

à Die le 21 juin 2024 sur un Leporello chinois à 24 volets, au format déplié de 25 cm de haut par 408, avec acrylique, encre Lamy de Princesse des Aires et collages de papier Antamoro fait à la main au centre de Madagascar par des paysannes rencontrées par la grande calligraphe botanisto-géologue du Museum d’histoire naturelle, j’ai créé le Semainier en poème que voici, dégageant de leur gangue actuelle de boue les cimes alentour du Glacier Fou :

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1

Lundi elles ont craquelé.

Levant les yeux elles ont vu

leurs ombres et même leurs âmes

déjà beaucoup plus haut dans le ciel

que les cirrus.

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2

Mardi déjà redressées sur un coude

elles ont posé leurs lèvres

sur la traîne des cirrus

et m’ont réaffirmé

que, montagnes oui,

elles ne sont jamais statiques

ni somnolentes.

.

3

Mercredi elles m’ont appelé sur leur épaule gauche

et y font place pour toi aussi

et pour quiconque a le cœur franc

.

puis sans triviale secousse

ont commencé la traversée des temps,

mangeant déjà les avant-goûts du futur.

.

4

Jeudi s’est étonné

de leur sieste en pleine mer, en plein ciel.

Elles se montraient vraiment aériennes.

Et toutes étaient fécondées.

Le poème naissait dans le léger vide

entre les trois premières et toutes les autres.

A mi-sieste certaines affichaient

le visage et l’inébranlable espoir

de migrants,

de héros

et de clairs enfants

qui vont parler.

.

5

Vendredi s’est tout particulièrement appliqué

à écouter les montagnes

car dans leur mobilité

est alors échu le moment

du chant diphonique,

de leur chœur

et de la triple réplique

qui déploie la réponse à l’énigme,

la phrase du plus long voyage

et le début du grand récit…

.

… le récit que les dieux vagues

ont abandonné il y a si longtemps.

.

6

Samedi je les ai vu se poser fort loin

faisant un archipel de montagnes,

vidangeant leur fatigue

car encore très long serait le voyage du grand récit

que nous comprenions et même  bâtissions

et que j’écrivais.

.

.

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Yves Bergeret

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Une réponse à “Semainier de l’envol des montagnes par le Gagok”

  1. Colette Klein dit :

    En m’imprégnant de votre poème j’ai l’impression de voyager, de me transformer en montagne, de ressentir ses secousses, de percevoir ses émotions ! Merci.

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