Chasse le boa
Face aux poussées populistes, aux sectarismes médiévaux et aux conspirationnismes illuminés, ce poème a été créé le 7 mai 2021 avec le point d’appui de dessins à l’encre de Chine que l’été 2004, dans les rochers de grès au débouché de Bonko tokié sur le plateau sommital de Koyo, Belco Guindo et Alguima Guindo firent auprès du poète, à l’encre de Chine et au piquant de porc-épic, sur un Leporello chinois à 24 volets de format déplié de 21 cm de haut par 372 cm de long. La vigueur de ces traits à l’encre, même d’entre les oppressions de la féodalité nomade et du grand banditisme, est sœur de la clarté de la parole qui dialogue et ne meurt jamais.
De ce poème le poète Francesco Marotta offre une traduction italienne limpide, sculpturale et puissante à cette adresse : Scaccia il boa | La dimora del tempo sospeso (wordpress.com)
*
1
Au boa constricteur de la bêtise
je dis non.
.
A l’autoritarisme académique
qui est borgne, qui crie dans mes oreilles
et s’imagine penser à ma place
je dis non.
.
A la condescendance dogmatique
qui renverse le lait de ma tasse
et qui tire sur moi ses salves
pour que j’ânonne ses instructions
je dis non.
2
A la bêtise opaque
j’oppose la joie de la cascade
et le rire limpide qui comprend.
.
A la tyrannie
j’oppose de l’aube à l’aube suivante
l’entente entre nous
.
Au mépris
j’oppose chaque soir notre choeur,
heureuse est notre fatigue :
nous avons défriché un nouveau sentier.
3
A la bêtise
je n’ai que ma chemise à offrir en butin
et même un lambeau de ma peau s’il le faut.
.
A la tyrannie
je n’ai que mon rire à délivrer,
tout mon rire, et je le déverse en infini ressac
sur ses marigots boueux et ses écueils noirs.
.
Au mépris obscurantiste
je n’ai qu’encore plus de clarté à répandre
pour que la pluie de la parole
irrigue encore mieux les corps tristes et blessés.
4
A la bêtise
je dis non
et choisis la personne, même dans son ombre,
et l’effort têtu de la montagne vers la parole.
.
A la tyrannie
je dis non
et choisis de multiplier la confiance dans le dialogue
qui fleurit, fleurit vers une perpétuelle moisson.
.
Au mépris
je dis non
et choisis de rendre transparente la frontière
car j’y ouvre brèche, car je lance pont
dont chaque arche est le poème clair
qui accueille.
*
Yves Bergeret
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13 réponses à “Chasse le boa”
Rètroliens / Pings
- 08/05/2021 -
- 08/05/2021 -
- 20/05/2021 -
Merci Yves.Voilà qui est clair et bien dit!
Au dialogue, à la solidarité, à la tolérance, à la main tendue, au sourire offert, à la générosité du cœur, je dis oui. Merci cher Yves. Je me permets de partager de beau poème avec mes amis sur Facebook
Merci au Porc-Epic
dont le piquant transmue
la devise royale
« Cominus et eminus »
(de près comme de loin)
en poème épiphane
A Koyo, en toro tégu, le porc-épic se dit yanga mandu, mot à mot le « singe de nuit ». Le singe est l’animal magicien qui grimpe les falaises verticales et ignore le vide ; la nuit est le champ/temps libre où se déchaînent les « esprits » étranges et ingérables. Dessiner au piquant de porc-épic, c’est donner à la ligne tracée l’énergie de l’animal insaisissable qui a pacte avec l’immense turbulence de la nuit.
YB
Merci, cher Yves, merci sans fin…
A reblogué ceci sur Paolo Ottaviani's Weblog.
Paul Eluard :
Sur la main que tu me tends
j’écris ton nom : Liberté
j’écris ton non…
A reblogué ceci sur vengodalmareet a ajouté:
« A la bêtise opaque
j’oppose la joie de la cascade
et le rire limpide qui comprend. »
Très beau poème. Pour une dignité retrouvée.
Sophie Jabès