Paume 手掌 Palmo

 

Poème d’Yves Bergeret, écrit le 26 février 2020 pour célébrer la première présentation du Trait qui nomme la veille au soir à Paris, avec seize dessins à l’encre de Chine et au piquant de porc-épic, créés dans le déroulement où ils sont ici, au format 22 cm de haut sur 17, par Dembo Guindo à Bonko, sur le haut plateau de la montagne de Koyo, le 22 juillet 2005.

A cette adresse : https://rebstein.wordpress.com/2020/02/28/paume-palmo/ on lit la très vivante version italienne de ce poème, due au poète Francesco Marotta.

A la suite de cette version originelle en français on lit ci-dessous la traduction de ce poème en chinois, grâce au poète Zhang Bo ; il l’a réalisée à Nankin et l’a conclue ce jour du 12 avril 2020.

 

 

1

 

 

 

 

Ton regard est mon rabot.

 

Mon corps est un bout de tôle,

tout vent y claque.

 

*

 

2

 

 

 

 

Il perd son crâne,

le dieu.

 

Il perd son titre,

le seigneur.

 

Il perd son cadastre,

le romancier.

 

*

 

3

 

 

 

A tous les étages

craque la prison du roman.

Entre les paliers

les marches s’éprennent

du trou dans le toit

et du gouffre sous la cave.

 

*

 

4

 

 

 

Avec une pince

je saisis la mort

par la nuque.

D’un sortilège

je jette au feu

notre pauvre peau de personnage.

Adieu, ma belle !

 

*

 

5

 

 

 

Saute l’unijambiste

par le travers de la montagne édentée.

Grimpe le manchot

par les écorces et les nœuds du tronc.

Germe dans sa clameur robuste

le bâtard né de la montagne et de l’arbre.

 

*

 

6

 

 

 

Je suis

tête à un œil,

chaudron renversé.

 

Le soleil m’est tombé

dans le front.

 

Je vais me mettre à penser.

 

*

7

 

 

 

J’ouvre toute grande ma paume.

Chaque doigt lèche

un point cardinal.

Le cinquième s’occupe

du feu sous la pierre.

 

*

8

 

 

 

Quant à mon torse

les cartes nautiques

et les encyclopédies grecques

s’y sont rangées

en s’écriant

à chaque battement de cœur.

 

*

9

 

 

 

Beaucoup d’enfants, mon ami.

Beaucoup de cruauté, mon feu.

Beaucoup de nids et de cris,

ma pauvre amie qui t’acharnes.

 

*

10

 

 

 

Alors j’ai lancé un grand cri

et le sol a basculé vers le couchant

en laissant apparaître deux pattes

sous son ventre blanc.

 

Alors j’ai lancé un grand cri

qui m’a transpercé la gorge

et la gorge m’a ruisselé

en cascade chantant

éperdument le monde.

 

*

11

 

 

 

Ma tête est deux fois pierre.

Une pour l’œil.

Une pour la bouche.

Pas de nez.

Mais oppressé

l’air,

mais agitées

la montagne

me supplie

avec brume,

la mer

avec écume.

 

*

12

 

 

 

Si ouverte est en ce douzième jour

ma paume que s’y lisent

les entailles des drames,

les plongeons de tout ce qui est naïf

et la cicatrice mal suturée

entre toi, chienne aveugle,

et toi, bourru palefrenier.

 

*

 

13

 

 

 

Sûrement je finirai

par n’être que miroir

offert au ciel pour qu’il compte

les rides de ses nuages et les éreintantes

croisades de tous ses romans

dont tu es machistement fier.

 

*

14

 

 

 

Je veux une forêt sur la mer.

Je veux une bronchite dans le récit.

Je veux un rocher dans la cascade.

Je veux cent mille arbres.

Je pars respirer l’autre récit

qui me dissolve pied par-dessus tête ;

et alors l’œil sera ce que je suis.

 

*

15

 

 

 

Merci à la planche

qui dérive sur la furie des langues.

Merci à la paume

qui a avalé mes deux paumes.

Merci aux rides

qui se sont plissées

dans l’âme terreuse.

 

*

16

 

 

 

La paume

a quatre rivières,

a quatre douves vides

et beaucoup

beaucoup d’adieux

qui prolifèrent de joie.

 

*

 

 

手掌

 

1

你的眼神是我的刨刀。

 

我的身躯是一截钢板,

八方之风在此轰响。

 

2

他失去他的头颅,

上帝。

 

他失去他的尊号,

大人。

 

他失去他的地契,

小说家。

 

3

在每一楼层

动摇小说的监狱。

在楼道之间

台阶钟情于

棚顶中的孔洞

和地窖下的深坑。

 

4

用一柄铁钳

我从颈部

抓住死。

借助魔法

我付之一炬

我们小说角色的可怜皮肤。

永别了,我的美人!

 

5

独腿人

经由缺齿山岳的岭线跳跃。

独臂人

借助树皮与木结攀援。

在它茁壮的叫喊中萌芽

诞生于山与树的私生子。

 

6

我是

独目头颅,

翻倒的锅釜。

 

阳光向我坠落

落于额中。

 

我即将开始思索。

 

7

我完全张开我的手掌。

每根手指触及

一个基点。

第五指负责

岩石下的火焰。

 

8

至于我的躯干

海航图

与希腊百科全书

放置于此

并随每一次心跳

高声呼唤。

 

9

许多孩子,我的朋友。

许多暴行,我的火焰。

许多巢穴与喧嚣,

我这把你猛追的可怜女友。

 

10

于是我发出一声大叫

土地朝日落处翻倒

并任由两只脚爪

在它的白腹下显露。

 

于是我发出一声大叫

它刺穿我的喉咙

我的喉咙开始流动

如瀑布般狂热地

歌唱世界

 

11

我的头颅是双重的石块

一重为了眼睛。

一重为了嘴巴。

没有鼻子。

但空气

让人压抑

但山海

动荡不已

山岳用薄雾

向我恳求

大海用浮沫

向我恳求

 

12

如果在第十二天我的手掌打开

它在此被认出

各种人生戏剧的切口,

所有天真的落败

还有草草缝合的伤痕

你进来,瞎眼的母狗,

还有你,粗暴的马夫。

 

13

我必将

最终成为镜面

交给天空让它计数

它云彩的皱纹

和所有它小说中令人疲惫的东征

而你对此极度男权地自负。

 

14

我想要一片海上森林。

我想要一次故事中的口吃。

我想要一块瀑布内的岩石。

我想要十万树木

我开始呼吸另一种故事

它把我上下颠倒溶解一空;

于是眼睛将成为我之所是。

 

15

向它致谢

那在语言怒潮上漂流的船板。

向它致谢

那吞下我双掌的手掌。

向它致谢,

那在土质的灵魂中

层层叠起的皱纹。

 

16

手掌

拥有四条江川

拥有四条排空的护城河

以及很多

很多次道别

因欢乐而激增。

 

 

*****

***

*

 

 

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