L’Apprenti

 

 

 

Poème en deux parties créé à Veynes le mardi 13 puis le mercredi 14 novembre 2018 par Yves Bergeret  à l’acrylique sur quadriptyques Hahnemühle ivoire 250g de 27 cm de haut sur 78 de large, en deux exemplaires.

 

On lit ce poème recréé en italien par le poète Francesco Marotta, à cette adresse :  https://rebstein.wordpress.com/2018/11/19/lapprendista/

 

*

 

 

 

 

 

Sur une grosse pierre du bord du chemin

elle a laissé tous ses vêtements du haut

et une partie du langage.

Un pagne autour de la taille, elle est entrée dans l’eau.

Complètement. L’eau est profonde.

Elle n’est jamais ressortie.

 

Cette partie du langage qu’elle a laissée sur la pierre

est respectée de tous. Elle reste claire

pour certains, même pour beaucoup d’entre nous.

On sait la lire. Ces mois-ci la parler est urgent.

 

A l’instant même où, refusant toute violence,

la mère s’en est allée

son fils s’est retiré du langage.

Mais il nous écoute, ses yeux le disent.

 

La partie du langage laissée sur la pierre

est la partie féminine.

Les rapides de la rivière, les remous,

les brochets, cela s’accorde très bien

à la bêtise des mâles.

 

Le fils entré pour le moment en mutisme

sait parfaitement les deux registres.

Il n’a pu suivre dans l’eau sa vieille mère.

De colère il se change en brume.

La brume ne parle pas.

Elle grince jusqu’en haut des falaises

et enduit de douleur,

de douceur la montagne.

 

 

 

 

Le fils donne à la montagne

la force de s’abaisser à l’aube,

la joie de laisser chemin au jour.

Peu après la brume peut s’en aller.

 

La montagne a des nageoires.

Elle va sans heurt de la mère au fils

et du fils à la mère.

Elle va dans les deux âges du langage

et dans ses deux genres

que la mère sait

et que peu à peu le fils traverse.

Il apprend la lutherie.

Il apprend la parole.

 

Le fils n’existe nulle part.

Il est mouvement.

Il est la poigne qui rend après la nuit

la couleur à la montagne

et qui rend l’espoir aux humiliés.

 

Il remonte le courant jusqu’à la source

où la montagne entre dans le ciel.

 

La montagne est son ombre, parfois, s’il s’allonge.

 

 

*

 

 

 

 

*****

***

*

 

 

 

 

 

 

3 réponses à “L’Apprenti”

  1. Antonio Devicienti dit :

    Magnifiques, émouvants. Ces vers conduisent à une réflexion intense.

  2. Geneviève Chignac dit :

    Magnifique ! Une nouvelle fois, je suis émue. Merci cher Yves

Rètroliens / Pings

  1. L’apprendista | La dimora del tempo sospeso - 19/11/2018

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