Cafés de la trame
I Caffè della trama
Quadriptyques horizontaux de format 25 x 65 cm sur papier Canson de 300gr
créés par Yves Bergeret avec Barbara Iannello & Simone Di Franco dans les montagnes de Die en juillet 2014
1
Dans les gorges de Gats, près de Châtillon en Diois, le mardi 15 juillet 2014
Par nécessité de boire
la montagne s’accoude
à la même table que nous,
coulisse par où entrera
un chant de grand voyage
YB
Per necessità di bere
la montagna si appoggia sul suo gomito
al nostro stesso tavolo :
dalle quinte entrerà
un canto di gran viaggio
****
Si troverà forse ancora l’inizio
davanti a questo Hotel del delfino
dove non sei, Ismene, amica mia,
una goccia di memoria nel caffè
o nell’acquario del bicchiere:
anche per un mare di pietra
che frana e strozza la gola
sciamano come gabbiani le rondini
e stridono le sartie reggendomi l’ombra
perché sempre mi trascina la tua vela.
SDF
On trouvera peut-être encore le début
en face de cet Hôtel du Dauphin
où, Ismène, mon amie, tu n’es pas,
tu n’es pas une goutte de mémoire dans le café
ni dans l’aquarium du verre :
même dans une mer de pierres
qui s’éboule et étrangle la gorge
volent en essaim de mouettes les martinets
et les haubans font leurs cris stridents en me levant l’ombre
parce que toujours m’entraîne ta voile.
***
La ronda delle rondini
sorveglia
il nostro intermezzo.
Oltre l’acqua crespa del torrente,
sono lì le parole,
dove siedi tu, nell’ombra verde.
Verde il cappello sopra.
Verdi i pensieri sotto.
BI
La ronde des martinets
surveille
notre entracte
Au delà de l’eau vive du torrent
il y a ici les mots,
oui, là où tu es assis, dans l’ombre verte.
Verte ta casquette au dessus.
Vertes tes pensées au dessous.
***
2
dans les gorges de Sahune, près de Rémuzat, au sud de Die, le mercredi 16 juillet 2014
Lungo la via della posta,
posso contare pochi indolenti pensieri,
come le quattro prugne alla tavola del caffè.
Ma dove va a finire il silenzio
nell’ora delle cicale?
Trascorre per la gola dei trenta passi,
uno per l’amarezza,
uno per il disincanto,
uno per ogni ambizione.
BI
Dans la rue de la Poste
je peux compter des pensées indolentes,
rares comme les quatre prunes sur la table du café.
Mais où est passé le silence
dans l’heure des cigales ?
Il est passé par la Gorge des Trente Pas,
un pour l’amertume,
un pour le désenchantement,
un pour chaque ambition.
***
Du fond de scène
entre à reculons
la fugueuse des villes.
La table du bar est son lit.
Remets droite sa complainte.
Lumière du poème naît du cœur des pierres.
YB
Dal fondo della scena
entra a ritroso
la scapatta via dalle città.
Il tavolo del bar è il suo letto.
Rimette in piedi il suo compianto.
Luce di poesia nasce dal cuore delle pietre.
***
A Saint Nazaire le Désert
per un altro caffè, nero
inchiostro del ritorno:
me lo conservi la pelle
fresca delle montagne
e l’Oceano sottile
che scava il suo chiostro
per i mottetti delle cicale.
SDF
A Saint Nazaire le Désert
pour un autre café, encre
noire des retrouvailles :
que me la conserve la peau
fraîche des montagnes ;
et aussi l’Océan subtil
qui creuse son cloître
pour les mottets des cigales.
***
3
A Poyols, près de Die, le jeudi 17 juillet 2014
Molto desolato, signora,
ma sono davvero per me
solo scampoli di vento
e mollica di parole
in questo Natale di luglio.
Né può, una camicia d’erba,
nascondere ai suoi Lari accoglienti
le farfalle dell’età,
gentile signora.
SDF
Vraiment désolé, Madame,
mais ce ne sont pour moi
que des lambeaux de vent
et des miettes de paroles
en ce Noël de juillet.
Une chemise d’herbe ne peut cacher
à vos accueillants dieux Lares
les papillons de l’été,
chère Madame.
***
Si fortes sont les répliques du passé
à nous quatre attablés
que la salle du café vire à la caverne.
Mais nos paroles avec tant de clarté
se peignent à ses parois
que se délivre la caverne,
montagne creuse belle comme la nuit,
dérivant en cadence
dans une épopée sans maître
YB
Sono così forti le risposte del passato
a noi quattro alla tavola
che la sala del caffè vira in caverna.
Ma con tanta chiarezza
si dipingono alle pareti
le nostre parole
che la caverna si libera,
montagna cava bella come la notte,
andando alla deriva con cadenza
in una epopea senza maestro
***
Occhi di cielo imbandiscono una tavola di feltro. Sul fondo della tazza, foglie verdi di tè. Poi, il sipario fresco di una casa-cantina sulla riva dei pioppi.
BI
Des yeux célestes dressent une table en feutre. Au fond de la tasse, des feuilles vertes de thé. Puis la tenture fraîche d’une maison-cave sur la rive des peupliers.
***
4
Au bord de la Sure, à l’entrée de la vallée du Quint, près de Die, le vendredi 18 juillet 2014
Ippocampo ad ogni canto
annuncia un circo itinerante:
«Indosserà i panni di Torrente
Mediterraneo salso, ironizzante;
Onda e Risacca – sappia la gente –
saranno Incanto e Disincanto…»
SDF
Un hippocampe à tous les coins de rue
annonce un cirque itinérant :
« Méditerranée salée, tout ironie,
endossera les atours de Torrent ;
Vague et Ressac – sachez-le, braves gens !-
seront Enchantement et Désenchantement… »
***
Il circo « La trottola » fermo sulla parete del caffè.
Lontano da qui, tra le pietre del fiume,
ogni tre sassi una foglia :
questo l’equilibrio del giorno.
BI
Le cirque “ Trottola” immobile au mur du café.
Loin d’ici, entre les galets de la rivière,
toutes les trois pierres une feuille :
l’équilibre du jour.
***
Vire le cirque rocheux,
roule le torrent dans les méandres de la gorge,
vire l’intrigue entre drame et rire.
Ce qui vire c’est le souffle
ravageur caresseur,
son ombre c’est la parole,
chapiteau double et sombre en forme de seins
dérivant en cadence
dans une épopée sans maître.
YB
Vira il circo rocchioso,
rotola il torrente nei meandri della gola
vira l’intreccio tra il comico e il drammatico
Quello che vira è il soffio
distruttore carezzatore
sua ombra è la parola,
tendone doppio e scuro in forma di seni
andando alla deriva con cadenza
in un’epopea senza maestro
***
5
Au pied du Grand Ferrand, dans le Trièves, le samedi 19 juillet 2014
Si legge bene al fondo dei caffè
che avvita la sua elica al cielo
l’immensa conchiglia del tuo tempio
tira giù nuvole, le più inquiete,
perché domani vuole tempesta.
Ma sulla dura roccia del volto
come falesia s’apre il sorriso.
SDF
Au fond des tasses de café on lit clairement
que l’immense coquillage de ton temple
visse sa spirale au ciel,
que vers le bas il tire des nuages, les plus inquiets,
parce qu’il veut pour demain une tempête.
Mais sur la roche dure de ton visage
un sourire s’ouvre comme une falaise.
***
Descend les gradins de la montagne et du calcaire
les gradins des cirques et des arènes
les gradins du hasard et des âges
les gradins de l’émotion et du toucher
le sourire,
enfant de la parole,
le sourire qui éclaire les contre-marches,
qui installe en paix dans la séparation
l’âme de qui sait,
le sourire qui avive au cœur de la soif
la joie de qui a compris
YB
Discende i gradini della montagna e del calcare
i gradini dei circhi e delle arene
i gradini della sorte e delle generazioni
i gradini delle emozioni e del tatto
il sorriso,
figlio della parola,
il sorriso che illumina le contromarce,
che dispone in pace nella separazione
l’anima di colui che sa,
il sorriso che ravviva al cuore della sete
la gioia di colui che ha compreso.
***
Gli anelli del monte Fabbro reggono la quinta teatrale. È un affresco tra gli specchi nella sala del caffè, l’orizzonte. E viene servito col dolce.
BI
Les maillons de la chaîne du Grand Ferrand tiennent droites les coulisses du théâtre. Il y a une fresque entre les miroirs de la salle de café, c’est l’horizon. Et on le sert au dessert.
***
6
A Die, le dimanche 20 juillet 2014
L’adieu sépare des continents.
Le fil d’or de la parole
jamais ne se défait,
sang du ciel sacrifié sans verser de sang,
patience qui danse et dort
dans la tasse de café,
patience qui danse et dort
dans les talons de l’étrangère
et l’étrangère renvoie l’adieu
brodant au ciel l’épopée notre.
YB
L’addio separa i continenti.
Il filo d’oro della parola
mai si sfila,
sangue del cielo sacrificato senza versare sangue,
pazienza che danza e dorme
nella tazza di caffè,
pazienza che danza e dorme
nei talloni della straniera
e la straniera ricambia l’addio
ricamando al cielo l’epopea,
la nostra epopea.
***
Fragile
perfetta
felicità
la leggi
nella seta del ricamo
la geografia
del cuore
BI
Fragile
parfaite
félicité
tu peux la lire
dans la soie de la broderie
la géographie
du cœur.
***
Sono i cerini degli anniversari
i fuochi fatui dei calendari.
Oggi li spegne un bordone di pioggia
che annacqua il caffè dell’arrivederci.
SDF
Il y a les allumettes des bougies d’anniversaire,
les feux follets des calendriers.
Aujourd’hui un bourdon de pluie les souffle
qui noie le café des adieux.
***
Commentaires récents